La famille Moulin, bourgeois de l’Orne

Du côté de la branche Tarisien de mon arbre, en remontant au XVIIè siècle, je me découvre des ancêtres originaires de l’Orne et désignés comme « Sieurs de » ou « Seigneurs de ». Il s’agit de membres de la famille Moulin, dont certaines branches venant de la commune d’Argentan ont été anoblies en 1697 et 1744. Mes ancêtres ne sont pas originaires de cette branche noble mais de la famille élargie, appartenant à la bourgeoisie locale. 

Le décès d’Yves Moulin, Sieur des Bouillons

Nous sommes le 17 avril 1679 et Yves Moulin, seigneur des Bouillons, est mort quelques semaines auparavant. Il laisse derrière lui sa femme, Antoinette Coignet, et six enfants mineurs. À cette époque, une femme a peu de droits et doit dépendre d’un homme: son père puis son mari, parfois un tuteur. Même devenue mère, ses droits sur ses enfants restent limités. Ainsi, au décès de son époux, Antoinette ne devient pas automatiquement l’unique représentant légal de ses enfants. Un conseil de famille doit avoir lieu pour désigner les tuteurs des enfants mineurs, et un homme doit être représentant légal. Ce conseil de famille a lieu le 17 avril 1679, devant un notaire. Plusieurs membres de la famille se réunissent donc devant maîtres Héron et Périer, notaire à Briouze. Antoinette Coignet est présente en temps que veuve du défunt et mère des enfants mineurs et le conseil est constitué de  Daniel Moulin Leriaire, de Philippe Moulin Sieur de Beauprey et frère du défunt, et de Marie Moulin, présente en temps que représentante de son mari Michel Bobot, marchand, qui n’a pas pu être présent et qui a donné procuration à son épouse pour le représenter. Quelques autres témoins portant le patronyme Moulin sont également présents. À l’unanimité, ils désignent comme tuteur actionnaire et principal le Sieur de Beauprey, qui est l’oncle des enfants. Antoinette est également nommée tutrice de ses enfants. Le conseil de famille donne aussi obligation de poursuivre l’éducation du fils aîné, François, qui est actuellement étudiant à Caen, et de faire instruire les deux fils puînés, Charles et Robert, dans les écoles du pays.

Acte notarié désignant les tuteurs des enfants d’Yves Moulin

Les enfants d’Yves Moulin

Arbre généalogique d’Yves Moulin

Quelques années passent et les enfants grandissent. François, l’aîné, termine ses études et devient procureur. Robert et Charles étudient le droit. Les trois autres sont des filles. L’aînée, Anthoinette, qui a reçu le prénom de sa mère, est la première à se marier. Faire faire de bons mariages à ses filles est l’une des missions principales des parents, tout comme faire instruire les fils pour qu’ils accèdent à de bons postes. En effet, par la profession des fils, une famille acquiert des pouvoirs, des privilèges sociaux, une position élevée et des revenus. Le mariage des filles permet de bonnes alliances avec des familles puissantes, offrant si possible une élévation sociale. Anthoinette épouse donc un homme de la commune voisine, La Sauvagère, le 15 février 1684, après avoir passé un contrat de mariage dix jours plus tôt. La jeune femme signe le contrat de mariage, montrant que, comme ses frères, elle a reçu une certaine instruction. Il faudra attendre sept ans avant que l’une de ses sœurs se marie à son tour. En effet, les deux autres filles de la famille, Françoise et Susanne, sont plus jeunes. La première est née en 1672 et la seconde en 1674. C’est donc en 1691, quand Françoise a 19 ans, qu’elle se marie. Son époux est Charles Bibault, sieur de la Ménardière, et donc lui aussi issu de la bourgeoisie locale. Deux ans plus tard, ce sont deux mariages qui sont célébrés ! En mai, c’est Charles, qui a hérité du titre de son père, qui se marie, avec Marie Desjoncherets, jeune fille de la commune. Quelques mois plus tard, c’est Susanne qui épouse Alexis de Paris, sieur de la Boulaye. Enfin, c’est en 1714 que se marie Robert, qui travaille comme procureur au parlement de Rouen.

Parlement de Rouen

C’est donc à Rouen qu’il épouse Magdeleine Viel, de vingt ans sa cadette. Ils auront ensemble un fils qui immigrera en Guadeloupe. Mais Antoinette Coignet n’en saura rien. Elle ne verra pas le mariage de ses quatre derniers enfants puisqu’elle meurt le 4 juin 1687, au Ménil-de-Briouze, où elle a vécu presque toute sa vie.

La vie de Charles Moulin et son épouse

Intéressons-nous plus particulièrement à Charles Moulin, le second fils de Yves Moulin et Antoinette Coignet. Charles hérite du titre de son père, Sieur des Bouillons. Pourquoi n’est-ce pas l’aîné, François, qui en hérite ? Nous n’avons pas plus d’informations à ce sujet. Charles s’est donc marié, le 5 mai 1693, au Ménil-de-Briouze, où il réside. Il a alors 26 ans. Il épouse Marie Desjoncherets, de neuf ans sa cadette. Un mois avant leur mariage, les futurs époux se rendent à l’office notariale de Briouze pour établir leur contrat de mariage.

Ce contrat nous en apprend plus sur la future épouse,  sur les liens familiaux des deux parties et surtout sur leurs situations financières respectives. Marie Desjoncherets, la future mariée, a 17 ans, est orpheline et est sous la tutelle de René Deschamps. Tous deux sont originaires de la commune de La Sauvagère, à 7 kilomètres au sud du Ménil-de-Briouze où vit Charles Moulin. Mais Marie a un frère, François, encore mineur lui aussi et sous la tutelle de René Deschamps. Le contrat stipule que Charles Moulin, le futur époux, est «obligé de se charger de la tutelle de François Desjoncherets». Si par son mariage Charles hérite de responsabilités, il obtient également une importante somme d’argent, apportée par Marie grâce à l’héritage qu’elle a reçu de ses parents décédés. Cet argent, qui était pour l’instant géré par René Deschamps, monte à la somme de 1200 livres, dont 800 livres constituant la dot de Marie, qui sera versée au mariage. Les 400 livres restantes seront versées petit à petit, sur plusieurs années, à la Saint-Michel et à Pâques. La future mariée apporte également son trousseau composé de linge et de meubles, comme le veut la tradition.

Après leur mariage, le jeune couple s’installe à La Sauvagère. Un an et demi après, ils accueillent leur premier enfant, une petite fille, qui sera appelée  Magdeleine. Les naissances vont se suivre puisque Elisabeth naît en 1696, Robert Charles en 1698, Anne en 1699, Françoise en 1701, Marie Suzanne en 1704 et enfin Suzanne, en 1707. Mais quand la petite dernière naît, le 5 novembre 1707, son père, Charles Moulin, est décédé. Sur la même page de registre, juste au dessus de l’acte de baptême de la petite Suzanne se trouve l’acte de décès de Charles. Il est mort le 25 octobre 1707, à l’âge de seulement 40 ans. Marie se retrouve donc veuve, avec sept enfants mineurs. La solution la plus simple et sûre pour elle est donc de se remarier rapidement. C’est ce qu’elle fait à peine plus d’un an après le décès de son premier mari, le 22 novembre 1708, à la Sauvagère, en épousant François Barré. De ce mariage naîtra un premier fils en 1710, appelé François, comme son père. L’année suivante, la fille aînée de Marie, Magdeleine, se marie à son tour. En 1713, Marie met au monde un autre garçon, et six mois plus tard, elle marie sa seconde fille, Elisabeth, avec Jacques Barré, membre de la famille de son mari François. Enfin, le 23 février 1716, alors qu’elle a 40 ans,  Marie accouche de son dernier enfant, une petite fille prénommée Suzanne dont la marraine sera l’une de ses soeurs homonymes. Marie accompagnera deux autres filles à l’autel, d’abord Françoise en 1724, puis Anne l’année suivante. La plupart des enfants qu’elle a eu de son premier mariage sont donc bien établis dans la vie et Marie devient veuve une seconde fois, quand son époux François meurt, en 1733. Marie vivra quant à elle une longue vie puisqu’elle décède une dizaine d’année plus tard, le 15 octobre 1746, à l’âge de 70 ans. 

Enfants de Charles Moulin et Marie Des Joncherets

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